Publié le 10 novembre 2021

La santé passe par l’assiette

Alors que le Parlement européen vient d’approuver à une large majorité, la stratégie « Farm to fork » qui vise à favoriser une alimentation plus saine et plus durable, et que France Stratégie publie un rapport sur les politiques de l’alimentation à la demande du président de l’Assemblé nationale, l’alimentation est désormais reconnue comme un déterminant de santé par une grande majorité de Français, désireux d’améliorer la qualité nutritionnelle des produits alimentaires qu’ils consomment.

 

L’alimentation, un déterminant de la santé pour de plus en plus de Français

La qualité de l’alimentation est devenue une préoccupation croissante des ménages pour des raisons principalement sanitaires et environnementales. Les inquiétudes le plus souvent évoquées concernent les antibiotiques, les hormones et les stéroïdes dans la viande, les pesticides, les polluants environnementaux et les additifs alimentaires.[1] Cette prise de conscience s’explique par plusieurs facteurs.

Tout d’abord, le lien entre alimentation et santé est désormais avéré. Publiées ces dernières années, plusieurs études scientifiques indiquent que l’alimentation est l’un des principaux facteurs de risque modifiables de mortalité. Selon sa qualité, elle peut être un facteur de protection de la santé ou au contraire un risque (voir le développement des pathologies chroniques et des affections de longue durée : divers cancers, maladies cardiovasculaires, diabète, obésité… [2])

En parallèle, la multiplication des crises sanitaires (lait contaminé, « vache folle » ou encore poulet à la dioxine) a fait émerger, chez les consommateurs, un besoin de compréhension ainsi qu’une exigence de transparence et de traçabilité. De plus en plus, ils exigent de savoir ce qu’il y a exactement dans leur assiette, d’en connaître la provenance et le mode de production.

 

L’alimentation, marqueur des inégalités de santé

Les efforts déployés par les pouvoirs publics dans le cadre des politiques de santé publique ont contribué à sensibiliser les Français à l’importance d’une alimentation saine et variée. Mais les inégalités sociales de santé demeurent, car l’exposition aux divers risques sanitaires varie en fonction des milieux sociaux. Par exemple, la stabilisation des prévalences du surpoids et de l’obésité observée depuis quelques années, ne s’accompagne d’aucune baisse du gradient social.

La crise sanitaire a également entraîné une augmentation du nombre de demandes adressées à l’aide alimentaire. De nombreuses personnes, notamment des jeunes et des femmes, se trouvent en situation d’insécurité alimentaire [3]. La qualité nutritionnelle de leur alimentation est beaucoup plus faible, et les apports en fibres, vitamines et minéraux ne répondent pas aux recommandations d’apports en nutriments.

 

Des outils nouveaux pour aider les consommateurs à se repérer

Pour répondre à ces nouveaux besoins, de multiples outils sont aujourd’hui proposés par la puissance publique, les associations et les acteurs de l’agroalimentaire, pour que les Français puissent rapidement évaluer la qualité nutritionnelle des produits qu’ils consomment et leurs possibles impacts sur la santé.

Pour aider les consommateurs à se repérer dans des tableaux nutritionnels complexes à décrypter, les pouvoirs publics ont encouragé le déploiement du Nutri-score, un étiquetage associant des couleurs – du vert au rouge – et des lettres – de A à E – qui permet d’estimer, en un coup d’œil, la qualité nutritionnelle du produit. En 2017, il a été adopté comme le logo nutritionnel officiel en France, mais n’est pas obligatoire.  Le 19 octobre, les eurodéputés ont voté en faveur de la mise en place d’un système « harmonisé et obligatoire d’étiquetage nutritionnel » d’ici 2023, et le Nutri-score pourrait être choisi.

Il existe également aujourd’hui de nombreuses applications permettant aux consommateurs de mieux connaître la qualité nutritionnelle des produits qu’ils achètent. Créées par des collectifs de citoyens, des entreprises, des industriels de l’agroalimentaire ou des associations de consommateurs, ces applications reposent sur des systèmes de notation différents. Elles ont un impact à la fois sur les consommateurs, qui ont modifié certaines de leurs habitudes de consommation, et sur les recettes des marques, qui ont fait évoluer leurs produits pour y être mieux notées. La plus connue d’entre elle est Yuka, l’application de notation créée en 2016 qui réunit 25 millions d’utilisateurs[4].

 

Comment aller plus loin ?

Les efforts déployés par les pouvoirs publics commencent à porter leurs fruits, notamment en matière de consommation de fruits et légumes et de surpoids. Mais il faut aller plus loin. Les Français, désormais sensibilisés, doivent pouvoir mettre en œuvre ces recommandations dans leur vie quotidienne. La généralisation des circuits courts, la vente de produits en vrac, l’autoconsommation font également partie des leviers d’une alimentation plus saine. Il faut désormais que l’ensemble des distributeurs redouble d’efforts dans la mise en place de ces services pour généraliser et démocratiser ces nouvelles habitudes de consommation.

 


Par Suzanne Gorge, Auteur du rapport Les applications de notation, un ingrédient de poids sur le chemin de la transition alimentaire ?

 

[1] Source: Eurobaromètre spécial sur la sécurité des aliments dans l’UE, avril 2019

[2] Selon le rapport de France stratégie Pour une alimentation saine et durable. Analyse des politiques de l’alimentation en France, en prolongeant les tendances alimentaires mondiales actuelles d’ici à 2030, les coûts sanitaires directs et indirects liés à l’alimentation devraient atteindre près de 1 300 milliards de dollars au niveau mondial, 57 % de ce montant étant imputable aux traitements des maladies associées (diabète, maladies cardio-vasculaires, cancers), et 43 % aux pertes de productivité et besoins d’assistance occasionnés.

[3] Voir Avis n° 89 du Conseil National de l’Alimentation (CNA)

[4] Chiffres septembre 2021