économie sociale et solidaire
Publié le 28 février 2022

Les mutuelles porteuses d’une ambition solidaire en santé pour l’ESS

La santé est un droit

C’est un droit humain, universel, intangible, inaliénable. Force est de constater que ce droit n’est pas pleinement effectif aujourd’hui. La santé est soumise à des logiques comptables et commerciales, comme à l’hôpital avec la tarification à l’activité, mais également en ville où les dépassements d’honoraires se développent et dans la complémentaire santé où la dérive assurantielle contamine les solidarités historiques : solidarité nationale et solidarité mutualiste.

 

Ces logiques comptables et commerciales ont des effets délétères massifs en termes de renoncement aux soins et aux droits pour les patients

Ces derniers sont alors dans l’impossibilité de se soigner à temps. Les effets délétères concernent aussi les professionnels : fermetures d’établissements et de lits, perte de sens, pénurie de personnels, travail des soignants contraint par des cadences infernales, impossibilité d’une prise en charge complète et adaptée aux besoins…

La santé touche de trop près au cœur de la condition humaine pour que ces constats nous laissent les bras ballants. La santé ne peut pas être une marchandise pour une raison évidente :  la logique libérale ne fonctionne pas et génère injustice et exclusion. En quelques décennies cette logique a échoué à résoudre la crise de la médecine de premier recours, elle a asphyxié l’hôpital public et les établissements médico-sociaux et a accentué les inégalités.

Depuis plus de 120 ans, les mutuelles s’efforcent pourtant de mettre en œuvre et de faire vivre l’idée que la santé doit être tenue en-dehors des logiques marchandes. L’économie sociale et solidaire est plus que jamais pertinente pour répondre aux défis immenses – et croissants – des besoins des populations en matière de santé.

 

L’ESS n’est pas une smartbox « supplément d’âme pour capitalistes en quête de sens »

C’est un autre mode de fonctionnement, un système cohérent, une exigence démocratique sans cesse renouvelée qui repose sur une organisation faisant vivre les territoires ; c’est aussi, indissociablement, un projet économique au service de l’humain non lucratif, par opposition à celui porté par les tenants du capital ; et c’est enfin un projet de société où toutes les « parties prenantes » de la chaîne de valeur économique se trouvent respectées, confortées et prises en compte.

L’ESS – l’économie sociale et solidaire – ne peut s’accommoder d’oublier l’un des trois termes qui la définissent. Ce ne peut être une « boîte à outils » où les entreprises piochent de quoi faire du social washing. Pour le mouvement mutualiste, il faut faire la part des choses dans nos pratiques, malgré le contexte concurrentiel et valoriser notre modèle pour faire reconnaître ses spécificités dans l’ESS, auprès du grand public comme auprès des pouvoirs publics et des institutions. Comment accepter que l’ESS soit louée comme un secteur d’avenir par certains ministres et « qu’en même temps », les acteurs historiques du mouvement que sont les mutuelles soient assimilées aux assurances et régulièrement attaquées par le ministre de la Santé ? Refusons ce double discours du gouvernement comme celui d’entreprises faisant de l’ESS un « supplément d’âme » et faisons-le savoir dans les instances nationales de l’ESS.

De ce point de vue, le domaine de la santé est exemplaire. Le scandale Orpea l’illustre malheureusement très clairement : la recherche de profit prévaut sur toute autre considération. A Orpéa, elle n’entendait pas s’embarrasser du soin nécessaire à nos aînés.

 

Pour sortir la santé des logiques marchandes

Le mouvement mutualiste peut porter les propositions suivantes :

  • Flécher les financements publics du secteur du médicosocial exclusivement vers les structures non lucratives ;
  • Réserver les activités de santé, de protection sociale complémentaire et de prévoyance aux acteurs non lucratifs ;
  • Plus largement, il faut bien sûr orienter prioritairement la commande publique et des délégations de service public vers les acteurs de l’ESS, notamment par l’introduction de critères socio-économiques rigoureux dans les appels d’offres.

La bataille pour la reconnaissance du rôle que doit prendre l’ESS dans le domaine de la santé est aussi une bataille culturelle.

La Mutualité doit également pousser les feux pour que soient enfin reconnues, valorisées et respectées, les spécificités de l’ESS, et notamment les spécificités des acteurs mutualistes dans le domaine de la santé. Cette bataille doit être intensifiée y compris à l’échelle européenne pour la reconnaissance de la spécialisation du risque santé, pour préserver la santé du secteur marchand.